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Qu'est-ce qu'un bon logothérapeute ? par J. Vik, directeur de l'institut de Fürstenfeldbruck

Le DEVENIR dans le regard de la logothérapie par V. Husser

Sens et bonheur par un collectif

La vie SENSationnelle, jeu collaboratif en orientation, créé par C. Arnoux-Nicolas

Il n'y a pas de sécurité dans la vie, entretien avec A. Längle

À partir de maintenant, méprisons la haine par O. Zsok

Les 10 thèses de la personne selon V. Frankl Traduction en anglais

Lettre annuelle de l'Institut de Fürstenfeldbruck Extraits

Tois forces par O. Zsok

Offensive culturelle européenne par O. Zsok

Le Dr Hérold TOUSSAINT, un homme de grande culture Le Quotidien d'Haïti

Repères logothérapeutiques pour la mutation de nos esprits et de notre monde, après le coronavirus COVID 19 par V. Husser

La logothérapie dans une coquille de noix par V. Frankl

Pensées au travers de l'épreuve par O. Zsok

Logothérapie et Droits de l'Homme par V. Husser

Une intense année de logothérapie par un V. Husser

Le sens d'une commémoration (Génocide rwandais) par V. Husser

L'acte thérapeutique par R. Kühn

Trouver le sens, donner du sens... Quelle est la spécificité de la logothérapie ? par V. Husser

La méthode de l'intention paradoxale développée par Viktor Frankl par B. Bayle

Redonner sens à la vie par C. Merle

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Article

Qu’est-ce qu’un "bon logothérapeute" ?

Institut de Fürstenfeldbruck

par János Vik, directeur

 

 

Evaluation de soi

C’est d’abord et fondamentalement un homme normal, qui a de bonnes connaissances en psychologie de la personnalité, mais qui n’a pas tendance à se surestimer.

 

Réalité

Il est ancré dans la réalité et il est aussi optimiste que pessimiste. Ce qui signifie qu’il croit en la Bonté de l’homme, qu’il est d’accord pour dire que la personne noétique ne peut pas tomber malade, mais qu’il est conscient de la vulnérabilité humaine.

 

Douleur

La logothérapeute compétente a bien conscience du fait que toute douleur n’est pas forcément psychosomatique, que toute dépression n’est pas noogène et que tout malade psychique n’a pas de problème de manque de sens. C’est pourquoi elle s’efforce de rechercher toutes les causes et tous les faits qui forment le contexte d’un certain tableau clinique, pour pouvoir interpréter le plus exactement possible les données du malade. Ceci signifie que là où il existe ne serait-ce qu’une possibilité lointaine que des facteurs comme par exemple une enfance difficile, des perturbations graves de la personnalité etc…aient pu jouer un rôle, la frustration existentielle et le manque de motivation ne doivent pas être considérés comme la seule cause et mis au centre de l’interprétation des faits. Selon les paroles de E. LUKAS : "Dans les perturbations psychiques profondes, qui sont étroitement liées à la structure de la personnalité, le logothérapeute ne doit pas mettre les lunettes roses en prévoyant une guérison rapide, ou pire, en la promettant au patient".

 

Les chances de guérison

Un bon logothérapeute n’ignore pas les causes, les erreurs et les dépendances pathologiques, mais ce qui le caractérise, c’est qu’il croit qu’il subsiste malgré tout des chances de guérison, selon l’affirmation contenue dans le credo psychothérapeutique : "Jusqu’au dernier souffle, chaque être humain a la possibilité de transformer sa vie par sa propre force, de l’améliorer, de lui trouver du sens - ou bien, après s’être réconcilié avec ce qui est advenu - de l’accepter".

 

Le logothérapeute est à l’écoute de ses patients, il écoute l’homo patiens, dans son individualité et son originalité, il lui fait confiance ; il est très important pour lui d’être attentif, de tendre l’oreille, et pour comprendre, de saisir avec le cœur les informations maladroitement exprimées.

 

Recherche des causes

Certes, le bon logothérapeute doit rechercher des causes, mais il doit aussi savoir les ignorer, avant tout si elles échappent à toute possibilité de changement et si leur connaissance entraine plus de mal que de bien. « Il y a des contextes qu’il vaut mieux laisser en paix car si on les force à devenir conscients, ils entravent la force de défi de l’esprit qui, justement, peut s’opposer à eux.

D’un autre côté, il existe bel et bien certaines situations pour lesquelles une recherche plus ou moins longue des causes est indispensable, si l’on veut avancer dans la compréhension du cas. Cela se produit quand des enfants nés pendant la guerre ont des enfants et des petits-enfants qui cherchent à comprendre ce qui s’est passé sous le régime nazi.

 

Résilience

Le bon logothérapeute apprend au patient à distinguer l’inévitable de ce qui peut être évité, à supporter ce qui ne peut être modifié, et là où les causes peuvent l’être, il lui apprend à poser un défi au destin soit-disant figé et le cas échéant, à le transformer.

A propos "résilience" : ce que l’on entend actuellement par résilience est un concept connu de longue date en logothérapie.

 

Le bon logothérapeute doit posséder un système large de valeurs personnelles, mais il doit aussi reconnaitre tout système qui lui est étranger. Ce qui lui importe, c’est moins la dispute autour de certains concepts (le diable, le Mal, la maladie, le désastre…) que l’aide concrète pour les personnes qui lui sont confiées. C’est pourquoi il cherchera le compromis qui a du sens et les ponts vers le système de valeurs qui lui est étranger.

 

Le logothérapeute doit, le cas échéant, reconnaitre sa propre lutte pour trouver du sens et cependant, il lui faut un certain accomplissement qu’il doit ressentir. Il est sûr que nous, logothérapeutes, restons des "chercheurs" et souvent, nous sommes nous-mêmes des êtres blessés. Pourquoi aurions-nous honte de le reconnaitre ? Voilà une chose. D’un autre point de vue, dans des domaines fondamentaux, les logothérapeutes que nous sommes avons aussi été des personnes qui "trouvent". Pourquoi le passer sous silence ? Certes, nous n’avons pas toujours l’obligation ou le droit de dire la (notre) vérité, et pourtant, notre parole doit toujours rester authentique, dans le sens où nous l’assumons entièrement.

 

Pour terminer, le bon logothérapeute - qui a une formation solide, qui est naturellement doué et qui a beaucoup d’expérience - peut et doit rester conscient qu’il reste toujours un apprenant qui met à profit pour cela chaque situation et chaque entretien.

 

En réfléchissant à ce qui vient d’être dit, en le ressentant, il nous apparait immédiatement que le professeur de logothérapie autant que l’étudiant sont soumis à de fortes sollicitations : il est fait appel à toutes les forces cognitives - avec le cœur et la raison, l’âme et l’esprit - pour se consacrer à la matière décrite ci-dessus avec toutes ses caractéristiques, et qui nous concerne tous dans notre existence en tant qu’hommes, tout simplement.

 

L’objectif de l’ensemble de la formation serait la consolidation organique de tout ce qui a été appris et expérimenté jusque-là, d’établir les différences, et l’intégrer en soi-même et pour soi-même, aux plans rationnel et émotionnel. L’entrainement à la pratique devrait s’ensuivre sans délai.

 

Dès l’entrée en formation, il est recommandé, au cours des conversations courantes avec les autres, d’être attentif à la problématique du sens et des valeurs. Car il arrive souvent que des symptômes cachent des questions existentielles auxquelles nous cherchons des réponses solides.

Traduction B. Schmidt

17/12/2023


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Article

Le DEVENIR dans le regard de la logothérapie

par Valentin HUSSER

 

« Dans ce monde incertain, qu’allons-nous devenir ? »

 

Telle est une des principales questions que se posent de nombreuses personnes. Elles sont submergées d’informations anxiogènes. Elles fatiguent et leur force de vie vacille. Les plus fragiles présentent de signes de névrose et les peurs s’accumulent. Le découragement gagne la société. Une telle question démontre une perte de sens de la vie.

La logothérapie de Viktor Frankl offre une perspective fondée philosophiquement, qui renouvèle la vision de ce devenir et invite à une action exprimant le sens de la vie, dans les situation concrètes.

« Les potentialités de la vie ne sont pas n’importe quelles possibilités, mais doivent être vues à la lumière des significations et des valeurs. C’est seulement à un moment donné, très spécifiquement, que l’un des choix possibles qui s’offre à l’individu lui permet d’accomplir la nécessité de la véritable mission de sa vie. C’est dans ce contexte qu’apparait le défi que représente chaque situation de vie, en même temps que le défi de la prise de responsabilité. L’être humain doit faire un choix parmi la multitude des possibilités présentes : lesquelles sont condamnées au non-être et laquelle sera réalisée, et, par suite, sauvée pour l’éternité ? Les décisions ne sont pas seulement définitives, parce que les aspects véritablement transitoires de la vie ont autant de possibilités. Lorsque l’une d’elles est actualisée, telle l’est pour toujours et ne peut jamais être détruite. Ainsi l’être humain doit faire face à sa responsabilité, et l’assumer au regard de ces « pas dans le sable du temps ». Il doit décider, pour le bonheur ou le malheur, ce que sera le monument de son existence. »

V. Frankl, Retrouver le sens de sa vie, page 107.

 

Le devenir procède de la tension entre ce qui est (Sein) et ce qui devrait être (SollSein) – et en amont, pourrait être.

« En effet, si tout est à jamais conservé dans le passé, tout dépend aussi de ce que à chaque moment de notre vie nous choisissons de « créer » en en faisant une partie du passé. Cette « création dans l’existence », dans le passé, est, en dernière analyse une création ex nihilo, tirée du vide de l’avenir.

C’est la raison pour laquelle tout est transitoire : tout est instable parce que tout prend son envol à partir de la vacuité de l’avenir et vient se loger dans la réalité du passé. C’est comme si tout était menacé par la peur du néant, et accourait du futur vers le passé, pour advenir à l’existence, en provoquant un afflux dans l’étroit passage du présent. Là, tout se presse et se bouscule, en attendant la délivrance – soit un événement se dirigeant vers le passé, ou un moment de vie ou l’une de nos décisions, admis par nous à entrer dans l’éternité. ».

V. Frankl, Retrouver le sens de sa vie, page 107

 

Le futur accourt vers le présent avec toutes ses potentialités.

Avez-vous senti ce vertige à un moment de votre vie ?

Le futur rencontre le moment présent et l’être humain découvre ses possibilités – objectives, car concrètes dans le monde où git le besoin du monde. Alors se pose la question du choix, car la finitude inhérente à l’existence humaine, inscrite dans le temps et l’espace lui impose de choisir une des possibilités et renoncer aux autres.

Cette possibilité qu’il choisit deviendra son avenir – son à-venir est son devenir ! Car le devenir est à venir !

Et cela sera quand il aura choisi une possibilité et l’aura actualisée, c’est-à-dire réalisée. Son choix procède de son intention. Cette actualisation se fera, soit pour soi-même, ou bien « en regard de la signification et des valeurs ». C’est alors que l’être humain trouve le sens de sa « véritable mission de vie ».

Avez-vous senti, trouvé quelle est votre mission de vie ?

Le choix peut être une auto-actualisation, un développement de soi pour soi, ou /et une auto transcendance, « un éloignement de ses intérêts égoïstes et une orientation vers l’autre ou plus grand que soi », un développement de soi, pour servir une cause plus grande que soi et qui honore la vie.

C’est ainsi que l’être humain construit ce qui sera son devenir, « le monument de sa vie ». Il y est invité, par sa volonté de sens.

Dans quelle expérience de la vie avons-nous senti cette

tension vers un accomplissement qui satisfasse

notre volonté de sens ?

L’actualisation d’une possibilité en faveur de l’environnement, conçu comme le devenir de la planète et de l’humanité est-il un moyen d’autoactualisation ou/et un devenir à servir ou au contraire à asservir ?

En « élargissant le spectre des valeurs » de l’individu, (mission confiée au logothérapeutes par Viktor Frankl), la logothérapie invite l’être humain à percevoir ses potentialités, ses ressources et ses talents, et les mettre au service d’une cause qui le dépasse. Prenant conscience qu’il fait partie de son monde, il peut choisir de servir le devenir de son monde et ainsi, de surcroit, s’actualiser. L’actualisation de soi est un effet et non une intention. Car l’intention de s’autoactualiser, déconnectée du devenir de l’humanité, ne pourra pas combler le vide existentiel dont la prise de conscience génère le désir d’auto actualisation. Ce sera seulement de l’ordre d’un manque à combler et non d’un accomplissement. L’accomplissement d’une œuvre humaine s’actualise « pour quoi », « en vue de quoi »

Quel est votre désir ? Comment sentez-vous votre inclusion à votre monde ?

Quand le devenir est-il achevé ? Viktor Frankl répond « En tant qu’être fini, l’être humain ne peut jamais achever l’œuvre de sa vie ». Et pourtant, à l’instant de sa mort, il ne pourra plus agir pour réaliser son œuvre. L’œuvre d’un être humain restera-t-elle essentiellement inachevée ? Ou s’achèvera-t-elle alors au-delà de lui ? Donc de par l’intention de qui ? De ceux qui poursuivront l’œuvre ou s’en inspireront pour leur propre œuvre ? Au service de qui ou quoi seront-il ? N’est-ce pas au service de plus grand que soi, donc de la Vie ? Frankl nous invite à choisir notre action en vertu des significations et des valeurs » qui sont le chemin du sens. Ce serait donc cela, servir l’intention de la Vie. C’est alors cela que Viktor Frankl nous indique quand il nous enjoint d’écouter la question que la vie nous pose dans notre situation existentielle et d’apporter une réponse dont nous prenons la responsabilité devant la Vie.

Se sentir « en devenir » ouvre à la perception de nouvelles possibilités contenues dans la situation existentielle.

Entendez-vous la question que la vie vous pose dans votre situation concrète ?

Les conséquences thérapeutiques de cette exploration du devenir peuvent être mises en œuvre dans le traitement des névroses noogènes. Également dans le processus de biographie thérapeutique. De même dans le choix d’un nouveau projet de vie personnel ou professionnel ou le traitement d’un problème existentiel. En quelque sorte dans toutes situations individuelles ou collectives où un choix s’impose, - dans toutes les situations de la vie, car elles portent toutes une signification.

Que vous inspire cette réflexion ? Dialoguons.

Le devenir pose la question de l’être. L’être en devenir. N’apparait-il que quand je prends conscience que je suis vivant dans l’instant présent ?

Explorer cette question et ses conséquences dans la thérapie et dans la vie quotidienne demande une poursuite de notre recherche.

Valentin Husser 17 juillet 2023

21/07/2023


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À LIRE

REVUE SCIENCES & BONHEUR

N°7 Automne 2022

 

Sens et bonheur

 Regards pluriels sur deux concepts en débat

 

Contenu :

 

   - Le bonheur au carrefour des conceptions occidentales et arabo-musulmanes: Caractéristiques, différences et impacts empiriques. Par Samia BenYoussef

   - Un modèle intégratif du bonheur pour en percevoir le sens. Par Marie-Pierre Deumon Feuvrier

   - «Durabilité au carré» : L’effectuation au service des carrières individuelles, du bonheur et des besoins du monde. Par Stéphane Bonzon et Shékira Rochat

   - Le jeu : Une approche porteuse de sens, voire de bonheur ? Par Shékira Rochat et Caroline Arnoux-Nicolas.

 

 Cliquez ICI pour charger la revue en fichier pdf

ou pour accéder à leur site.

29/08/2022


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ENTRETIEN AVEC A. LÄNGLE

 

Chers amis,

J'ai le plaisir de vous communiquer la traduction de ce texte d'A. Längle. Bonne lecture !

Bernadette SCHMIDT

 

Il n’y a pas de sécurité dans la vie (A. Längle)

 

Chaque être humain a fait l’expérience de sa manière de maitriser les crises. Mais la pandémie relevait et relève encore d’une autre dimension. Pour nombre d’entre nous, il y allait de la simple existence économique, parfois jusqu’à la vie et la mort. Voici un entretien des « Salzburger Nachrichten » avec A.L. thérapeute en analyse existentielle, sur la maitrise de la peur et cette profondeur spirituelle qui dépasse de loin notre existence.

 

SN : Pourquoi le Corona nous a-t-il atteints si durement malgré notre expérience des crises ?

 

Les crises sont tenaces, particulièrement cette pandémie. En comparant avec les crises courantes, le poids à porter cette fois est plus lourd. Beaucoup de gens ont atteint leurs limites sur les plans économique, physique ou psychique ou ont eu affaire à la mort. C’est comme si nous étions dans une barque qui flotte sur l’océan de notre existence. Dans les crises simples, l’embarcation se contente du roulis, dans une crise grave, elle est en danger. Il faut pourtant savoir que le danger fait partie de notre existence.

Les petites crises sont importantes. Elles sont susceptibles de nous préparer à d’autres, plus graves, si nous nous positionnons face à elles, les regardons en les prenant au sérieux. C’est ainsi que nous avons déjà acquis la grammaire qui régit aussi les grandes crises. Car c’est la même force qui fait déborder le lait ou provoque l’éruption volcanique, comme l’a dit Adalbert Stifter.

 

SN : Une grande partie de ce que nous avons refoulé a refait surface comme un coup du sort, allant jusqu’à la possibilité d’une mort soudaine et inattendue.

 

Vous dites là quelque chose de très précis. En l’absence de crise, nous prenons les éventualités à la légère. Mais la crise nous oblige à réfléchir à ce que signifie une éventualité sur le plan existentiel : elle peut devenir réalité. Il se peut que je me retrouve en service de réanimation et que je puisse mourir réellement. Cela m’amène à évoluer : que ferais-je alors, quelle serait la situation pour moi ? Si je ferme les yeux devant cette réalité, en cherchant à vivre en dehors d’elle, je joue à colin-maillard. C’est là que je risque de me précipiter dans l’abîme, parce que je ne le vois pas. En prévention, mon psychisme développe de la peur. Il m’ordonne de regarder la réalité en face et de me préparer aux éventualités. Sinon, le risque est de vivre dans l’illusion et non dans la vie réelle. Les éventualités peuvent ainsi devenir réalité : il se pourrait que je succombe au corona.

 

SN : Dans quelle mesure notre confiance en la vie en est-elle anéantie ?

 

La pandémie nous a forcés à faire l’expérience de la donnée fondamentale de notre existence, à savoir qu’il n’y a aucune sécurité dans la vie. Beaucoup de gens en ont été déstabilisés. Cela peut aussi mobiliser un manque caché de confiance fondamentale. Sont particulièrement touchés tous ceux qui ont été confrontés à des décès ou à une évolution grave de la maladie. Certains ont été réellement traumatisés. Etre traumatisé signifie qu’on a été dévasté en profondeur : séisme, tsunami, guerre, viol, maltraitance. Ces traumatismes-là détruisent la confiance fondamentale dans une telle mesure qu’on perd toute confiance dans son existence-même. Alors, la base de la confiance fondamentale disparait. Pour se remettre de ces épouvantables expériences, il faut beaucoup de temps.

 

SN : Comment peut-on retrouver progressivement de l’assurance ?

 

Dans la vie quotidienne,  il faut de la protection,  de l’espace et du soutien.  Qu’est-ce qui me procure tout cela ? Où puis-je trouver un espace où je me sente chez moi et en sécurité ? Qu’est-ce qui me soutient dans ma vie ? On peut nommer beaucoup de choses : des relations sûres comportent tous ces aspects. Mais la foi religieuse, elle aussi, peut me procurer protection, espace et soutien. L’expérience du soutien est importante, car la fermeté de ce socle permet de diminuer l’anxiété et le sentiment d’insécurité. Cependant, l’assurance n’apparait qu’avec la confiance fondamentale. Celle-ci remonte au temps précédant la naissance. Longtemps, on a admis qu’elle n’évoluait plus, passé un an. On sait maintenant qu’elle est une dimension susceptible d’évoluer et qui absorbe continuellement les expériences négatives et positives, tout au long de la vie C’est ainsi que cette confiance fondamentale, nourrie pendant des décennies, peut s’effondrer à 50 ans. Les êtres humains souffrent alors de flashbacks, de troubles nerveux, font des cauchemars, et sont incapables de mener une vie normale.

Mais l’inverse est également possible. La confiance fondamentale peut se reconstruire à tout âge, même tardivement. L’arbre est capable de refaire un ancrage de ses racines dans le socle de son être.

 

SN : Quelle est la signification qui se dégage de ces expériences-limites ? Quelles conséquences positives peuvent-elles entrainer ?

 

Ces expériences-limites peuvent nous inciter à plonger notre regard dans la profondeur spirituelle, dans la nappe souterraine où nous avons nos racines et dont notre existence tire sa force. Cette profondeur qui s’ouvre en arrière-plan, nous en sommes rarement conscients dans notre quotidien, ce qui ne nous empêche pas d’en sentir et ressentir la présence. En pleine crise, elle devient de plus en plus consciente.

 

SN : Cette profondeur, cette eau souterraine est-elle une dimension qui nous met tous en lien ?

 

La manière dont nous percevons nos expériences a toujours une coloration subjective, mais la base est la même. La dimension spirituelle ne relève pas forcément du religieux, mais d’un vécu psychique qui reste possible pour tous, indépendamment de la foi. Il s’agit de l’expérience que l’on fait personnellement d’un ordre de grandeur qui nous dépasse largement. Le ciel étoilé au-dessus de nous, l’immensité de la mer, le rire d’un enfant, mais aussi le gouffre sans fond de l’existence face à des morts par millions - c’est là que quelque chose en nous est touché en profondeur. Là se révèle une dimension que nous ne maitrisons pas.

Nous nous étonnons, nous frémissons, nous sommes peut-être gagnés par la crainte, nous concevons de la gratitude pour ce que nous possédons mais dont nous ne disposons pas, mais où nous nous situons. À qui s’adresse notre gratitude ? À la nature, à nos parents, à un dieu, à un ordre cosmique, au destin, au hasard ? La question reste ouverte.

 

SN : Quel est l’effet de l’expérience de cette profondeur et de cette immensité ?

 

Je prends conscience que je suis ici en situation de récepteur plutôt que de créateur, que tous les domaines de l’expérience existentielle font partie d’un cadre qui nous dépasse très largement. Notre existence est traversée par des mystères qui dépassent notre raison, et dans lesquelles elle se coule. Nous pouvons les rencontrer par hasard, à condition d’être réceptifs et prêts à le faire. Cet abîme et cette immensité, qui nous donnent peut-être des frissons, nous touchent en profondeur, car ils portent en eux l’intuition de notre propre origine : le lieu d’où nous venons, le but de notre naissance, celui de notre évolution, notre devenir, notre disparition. Le fait d’être touché par le mystère peut se traduire sans difficulté dans l’expression religieuse de la crainte, l’adoration, la méditation silencieuse, la foi.

 

Traduction : B. Schmidt

05/06/2022


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Point de vue

À tous les amis de la logothérapie,

de la part d’O. Zsok, directeur de l’Institut de Fürstenfeldbruck

 

A partir de maintenant, méprisons la haine.

 

Dimanche 27 février 2022

 

L’auteur de ces lignes reconnait volontiers qu’il est profondément ébranlé par la folie guerrière qui a gagné l’Europe, sachant que cette fois aussi, comme jadis le 1er septembre 1939, la guerre a été provoquée par un seul agresseur. Dans les deux cas, et chaque fois qu’une guerre est menée, la haine est présente en arrière-plan, car toutes les guerres sont les filles de la haine, et celui qui ne sait pas haïr est un guerrier sans valeur. C’est pourquoi la propagande du Kremlin diffuse des fausses informations s’appuyant sur la haine de l’Ukraine. Un seul homme se sent la mission particulière de détruire le système de sécurité établi en Europe depuis 30 ans. Le phénomène ici nommé s’appelle selon la formulation d’Alfred Adler « la volonté de puissance ». Cette volonté n’est en soi ni bonne ni mauvaise. Pas plus que la puissance en soi, à priori. Car le mal entre en jeu à travers la haine, alors qu’un individu en envie un autre pour des choix qu’il désapprouve en refusant de se soumettre à sa volonté. La jalousie est trop souvent, chez l’homme, la force psychique sombre qui réveille une haine infernale. Tant que l’Europe sera gouvernée par des hommes politiques pétris de jalousie et de haine, notre continent ne connaitra pas la paix.

 

Au 4ème jour de la guerre contre l’Ukraine (dim. 27 février 2022), c’est un tel homme que je vois, qui non seulement lance une opération militaire contre un pays frère, mais mène contre lui une guerre brutale et perfide - environ 300 000 personnes ont déjà pris la fuite - et finira par déstabiliser toute l’UE. Sa tyrannie et son despotisme doivent s’entendre et se ressentir en référence au mal.

 

Personnellement, je ressens ce mal quand, à la télévision, l’agresseur diffuse sa propagande mensongère, ses radotages selon lesquels son pays serait entouré d’ennemis, que sa mission serait de protéger son pays et peuple, en foi de quoi il serait obligé de mener à bien cette opération militaire particulière. Et il poursuit ses menaces, oui, on verrait qu’il se passerait quelque chose d’horrible, du jamais vu, si l’on se risquait à s’immiscer de l’extérieur pour l’arrêter. L’homme, qui se voit en second Napoléon ou Staline approche du faîte de sa gloire. En même temps, il s’est trompé du tout au tout dans ses calculs et les dommages qu’il cause aussi à son propre pays est incommensurable. Il ne se laisse pas impressionner par le fait que dans son pays vivent également des personnes de raison qui protestent contre cette folie. Il va provoquer dans les jours et semaines qui viennent d’atroces souffrances et d’immenses destructions. Il va continuer à tuer des civils innocents. Il va tenir des propos venimeux sur l’Occident qui se contente de regarder en refusant l’engagement militaire. La situation rappelle vivement celle de la guerre en Yougoslavie : à ce moment-là, aussi, l’Occident s’est contenté de regarder, sans arrêter le chef de guerre d’alors, ce fou de Slobodan. Cependant, cette fois, l’Occident rassemble ses forces. La Russie est dès ce jour exclue du système de paiement SWIFT.

 

Jamais la guerre n’a été une solution aux problèmes. Sur Telegram, une centaine de journalistes et d’experts russes ont condamné l’attaque de l’Ukraine. « La guerre n’est pas et n’a jamais été une méthode de résolution de conflits » (Süddeutsche Zeitung, 25-2-2022-S2).

 

De nouvelles protestations en Russie montrent que beaucoup de gens, même s’il ne s’agit pas de tous, s’opposent à la guerre et par là à leur président. Ce dernier, imprégné par sa formation dans le cadre des services secrets, ignore que la guerre ne résout pas les problèmes. Au-delà, il est guidé par l’esprit de vengeance tout comme par une vision du monde d’un nationalisme extrême construite de toutes pièces. Son narratif, c’est le génocide au Donbass, les néonazis qui auraient pris le contrôle à Kiev, la trahison de l’Otan qui n’est pour lui que l’instrument de la politique étrangère des Etats-Unis, derrière lequel se cache le grand ennemi. En réalité, ce seraient les USA qui attaqueraient son pays, et le pousseraient à se défendre. Il ne s’agit pas ici de présenter les USA sous les traits de l’agneau innocent, mais dans ce cas, il ne fait aucun doute que c’est le gouvernement du Kremlin qui a lancé la guerre d’invasion de l’Ukraine. Voilà le fait historique, tel qu’il faut aussi comprendre le fait que le 1er septembre 1939, Hitler a provoqué la guerre et a précipité l’Europe dans l’enfer. Mais aujourd’hui, c’est le président russe qui s’apprête à gravir la dernière marche avant le précipice.

 

L’art et la manière dont le gouvernement du Kremlin cherche à justifier sa guerre, en alignant les mensonges, rappelle un modèle dont se sont servis tous les dictateurs. Rappelons-nous la propagande pendant la guerre de Yougoslavie, ou celle de décembre 1989 lors de l’assassinat du dictateur roumain. De même que ce dernier a ruiné son pays, le président russe va ruiner la société russe. La vérité, c’est que personne n’a eu l’intention d’attaquer ou d’encercler la Russie. Mais tous ont tendu la main, se sont efforcés d’employer la voie diplomatique, pour résoudre justement les problèmes de manière diplomatique. La voix du pape François sur Twitter a certes raison en disant que la guerre, c’est l’échec de la politique et de la diplomatie. Il est sûr également que l’Occident a manqué le moment propice à la diplomatie en 2014. Mais il est tout aussi sûr que l’Occident et particulièrement l’Union européenne, a cherché à coopérer avec la Russie, puisque de nombreux intérêts, aussi bien économiques que culturels, la relient la Russie.

 

Mais…mais…mais quand l’une des parties refuse la main tendue, n’a que la vengeance en tête et est imprégnée de haine envers l’Occident, alors là, le résultat ne peut être que la guerre. Aujourd’hui, 27 février 2022, 8h30, le fait est que les troupes russes font irruption rapidement dans le pays voisin et que Kiev est sous le feu de l’ennemi. Le nombre de réfugiés augmente d’heure en heure, de jour en jour, et nous voilà de nouveau exposés à un nouveau traumatisme en Europe. Bien évidemment, je crois que la lumière sera plus forte que les ténèbres. Mais je suppose aussi que les forces des ténèbres ne disparaitront pas en deux semaines, comme me le disait une de mes connaissances, optimiste s’il en est, mais qu’elles feront encore rage bien plus longtemps que cela. Cela fera monter de manière exponentielle le prix que l’Europe devra payer pour sa future ascension, et celle-ci mettra beaucoup plus de temps que je ne l’avais supposé dans mon roman*. Ce n’est que si l’Union Européenne est vraiment prête à payer le prix, c’est-à-dire à mettre en œuvre des sanctions maximales contre la Russie, que cette guerre sanguinaire contre l’Ukraine pourra être raccourcie, peut-être. Sommes-nous prêts, en tant qu’Union européenne, aux renoncements nécessaires ? Oui, il faut aider les réfugiés, c’est bien, c’est urgent et indispensable.

 

Il est trop tard pour dire « J’ai sous-estimé l’imprévisibilité de Poutine » (S. Wagenknecht) Car - c’est une image - le train est parti, il fonce à 100km/h, et son conducteur c’est le chef du Kremlin. Il est le seul à pouvoir l’arrêter. Ce qui est décisif, c’est ce que les forces unies du « monde libre » feront à présent : UE, USA, Canada, Australie, Japon. Il est certain que la Chine pourrait dire « stop » en usant de sa puissance, mais la Chine poursuit ses propres intérêts, tout en observant la situation de près.

Du point de vue du réalisme politique, il n’existe qu’une mesure : limiter et circonscrire le théâtre des interventions, exercer une pression maximale sur le Kremlin par la voie diplomatique. Un regard sur notre histoire nous permet de nous consoler en nous disant que Napoléon a fini par disparaitre, qu’Hitler, Staline, Ceaucescu et d’autres dictateurs semblables ont disparu à leur tour. Et Poutine, lui aussi, va finir par quitter la scène de l’Histoire. Mais en attendant, il y aura de grandes destructions, et le prix que va devoir payer l’Europe pour épanouir son esprit, est déjà très élevé et augmentera encore. Les temps seront amers et durs.

 

* Voir O. Zsok, « Europas Aufstieg hat seinen Preis » Ein philosophischer Europaroman -1901-2021- Fürstenfeldbruck 2022).

 

(Traduction : B. Schmidt)

03/03/2022


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Pour les anglophones

Texte transmis par N. Haberman :

Les 10 thèses de la personne

par V. Frankl

traduction en anglais par F. Vesely et D. Nolland

à télécharger ci-dessous.

21/02/2022

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Extraits de la Lettre annuelle de l’Institut de Fürstenfeldbruck

 

Chers amis de notre institut, collègues d’Europe et hors d’Europe, nouveaux diplômés et étudiants,

 

« Une nouvelle année n’est qu’une nouvelle date, mais elle n’est certainement pas une fatalité », comme exprimé dans un poème. Donc, voilà : que nous dirigions notre regard vers le passé ou vers l’année qui vient, nous pouvons faire le constat que nous ne nous laisserons influencer ni par les êtres fatalistes ni par les idées complotistes. Car finalement, c’est la volonté de sens qui oriente les événements vers le bien et vers le sens.

 

Si nous regardons avec franchise l’année passée, nous y distinguons à la fois des raisons d’espérer et d’autres qui peuvent nous inquiéter. Certains mots - changement climatique, réchauffement terrestre, corruption dans le grand style, des fleuves de haine dans le monde réel et virtuel - peuvent nous plonger dans la peur. D’autres expressions - protestations de la jeunesse afin d’obtenir une politique plus responsable vis-à-vis du climat, les efforts des Églises dans le traitement de la violence sexuelle et émotionnelle contre les enfants et adolescents, le rayonnement de quelques personnalités dans les domaines social et politiques - renforcent l’espoir de ne pas nous trouver devant le « naufrage de l’Occident » (O. Spengler)

 

Nous nous trouvons plutôt dans un puissant processus de transformation, qui demande son lot de sacrifices, dans le sens d’une augmentation de l’être et d’une diminution de l’avoir, d’une auto-limitation, ou d’un renoncement ayant du sens.

 

Nous vous souhaitons de tout cœur la force d’un grand espoir, et la « patience des saints » pour la nouvelle année. Que le grand nombre puisse vivre dans la lumière ce qu’il est au fond de son être.

 

Otto Zsok- Nadia Palombo

07/01/2022


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Article

 Trois forces

Otto ZSOK  13 avril 2021

 

Les trois forces qui agissent en chaque être humain sont la force de la pensée, celle du cœur et celle de la volonté. Selon la situation, je ferai davantage appel à la force de la pensée, ailleurs, j’activerai la force du coeur, et souvent, par exemple dans les luttes de pouvoir, je mettrai en œuvre la force de ma volonté.

 

L’expression "lutte pour le pouvoir" n’est ici qu’un exemple, sans penser directement à MM. Laschet ou Söder, ou sans songer aux luttes de pouvoir que mène en Hongrie V. Orban contre l’UE et contre ses concitoyens dans son pays. Cette mauvaise manière de mener les luttes de pouvoir, qui finissent en spasmes à leur point culminant, caractérise depuis des millénaires l’histoire de l’animal terrestre humain tapi au fond de nous. Seul un petit nombre d’entre nous prend conscience, de temps en temps, bien trop rarement d’ailleurs, que dans l’homo humanus se trouve aussi un homme spirituel, qui à l’aide de la force du cœur - sa capacité spirituelle de ressentir, surpassant l’acuité intellectuelle, aussi admirable soit-elle- peut relativiser ses errements et peut-être même les éviter. "Car la finesse du cœur peut se révéler bien supérieure à la subtilité de la raison", disait V. Frankl, et il serait bon pour la paix et pour nous tous, dans la crise de la culture politique que traversent actuellement l’Europe et le monde, d’accorder plus d’espace et de portée à cette finesse et à cette subtilité du cœur.

 

Est à considérer comme une pensée erronée, dans le cadre d’un certain programme du parti AfD, celle qui veut que l’Allemagne quitte l’Union européenne, afin de lui rendre sa "normalité". Les gens qui nourrissent de telles pensées - il y en a en Pologne, en France, en Hongrie - ne font que trahir leur incapacité à toucher leur sensibilité profonde, le sentiment du cœur, bien que, répétons-le, chaque être humain possède en lui les trois forces : celle de la pensée, celle du cœur et celle de la volonté. A vrai dire, sans apprentissage ni entrainement, ces forces peuvent se retirer sur elles-mêmes pour devenir latentes et "s’endormir". Car il est bien vrai que c’est en forgeant qu’on devient forgeron. Et celui qui n’envisage que des entrainements militaires - une fois encore, je ne pense pas seulement à l’actuel gouvernement russe qui exécute des manœuvres militaires massives à la frontière ukrainienne (sans que le but soit clair), - donc, celui qui n’envisage que des exercices militaires peut devenir, dans ce domaine, un vrai champion, dont la non-valeur est devenue absolument évidente depuis la deuxième guerre mondiale. Est-ce que les hommes peuvent aspirer à des non-valeurs à la place des valeurs ? Oui ! Les hommes peuvent-ils détruire tout ce qui a grandi de manière organique, au lieu de protéger et de conserver ce qui a grandi de manière organique ? Oui ! Et ceux qui agissent ainsi associent la force de leur volonté au Mal, et la force de leur pensée à celle de la destruction. C’est ainsi seulement que l’holocauste a pu devenir réalité. C’est ainsi seulement qu’est menée la guerre en Syrie depuis 10 ans, alors que les "grandes puissances" font fi de la force du cœur, qu’elles possèdent elles aussi, jusqu’à l’opprimer. Voilà le mysterium iniquitatis, le mystère du Mal, contre lequel toute pensée, qu’elle soit philosophique, psychologique ou théologique, reste impuissante. C’est pour cette raison, et parlant pragmatiquement, que la question suivante doit être posée avec force : à quelle action, dans quel but, nous appelle, nous tous, avec exigence, le fait que les conflits armés soient toujours considérés en 2021 comme solutions présumées de certains problèmes ? En quoi la guerre serait-elle bonne, et dans quel but ?

 

La pensée fine et adéquate s’élève lorsqu’elle est orientée vers un sens. La force sensible du cœur s’élève lorsqu’elle perçoit l’autre Moi dans son prochain - le Tu - qui cherche dans mon Moi son bonheur et son sens. Et la force du vouloir s’élève quand elle prend clairement conscience qu’elle est volonté de sens. La mise en relation harmonieuse des trois forces agissant en chaque homme commence dans la tendre enfance et peut être promue à travers une offensive éducative axée sur la recherche de sens. Toute l’Europe en a besoin. C’est là le grand devoir qui nous incombe en Europe.

25/09/2021


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Article

 

 Voici la traduction d'un texte d'Otto Zsok, réalisée par Bernadette Schmidt, texte qui a été écrit à l'occasion du 8 mai.

 

Offensive culturelle européenne

Otto ZSOK

27 avril- 8 mai 2021

 

Lorsque Viktor Frankl (1905-1997) fut libéré, le 27 avril 1945, du camp de Türkheim par les soldats américains, il mit un certain temps à réaliser que la liberté retrouvée était bel et bien réelle. Lorsqu’il réalisa quelques mois plus tard qu’aucun membre de sa famille, excepté sa sœur en Australie, n’avait survécu, il traversa la phase la plus noire de sa vie : "La nuit obscure des sens et de l’esprit". Pourtant, grâce à son travail, à sa volonté de trouver un sens non déterminé, mais plus encore grâce à l’amour de sa seconde épouse, Eleonore, il retrouva peu à peu le chemin de la vie, à partir de 1946, et bientôt, en 1948, sa psychothérapie orientée vers la découverte d’un sens, qui avait déjà été entièrement élaborée avant la guerre, trouva son appellation avec les concepts de logothérapie et d’analyse existentielle.

 

Aujourd’hui, puisqu’elle met en avant la catégorie du sens, elle fait partie des forces constructives éminentes dont l’Europe a besoin. Avec son anthropologie et forte de son point de départ, la recherche de sens, la logothérapie ne peut pas se contenter de former des logothérapeutes dans ses instituts, mais elle est appelée à prendre sa place dans la formation à l'éthique sociale et à la politique par sa capacité à transmettre les traits fondamentaux d’une culture politique nouvelle, plus humaine, qui s’oriente vers les valeurs et le sens. Nous en avons un besoin urgent.

En tant que psychiatre, V. Frankl avait lui-même ébauché une "offensive culturelle" à l’été 1947 en écrivant et en pratiquant ce qu’il écrivait : "À une époque comme la nôtre, où les masses se trouvent dans une détresse spirituelle sans pareil, il est plus que jamais nécessaire de donner une direction à cette détresse. Non seulement les milieux médicaux mais aussi les milieux culturels religieux et politiques sont conscients de leur responsabilité sur ce point. Ils savent qu’il s’agit d’éduquer l’humanité actuelle afin de l‘empêcher de se précipiter, pour la dernière fois et définitivement, dans l’abîme". (V. Frankl, in "Die Psychotherapie in der Praxis, Vorwort") Ensuite, V. Frankl parle de la revendication d’une psychothérapie sociale et de la nécessité d’une hygiène psychique collective, en insistant sur le fait que beaucoup sont concernés par l’appel à la prise de conscience de cette responsabilité : les chercheurs, les psychothérapeutes et les pédagogues. Car il s’agit en fin de compte de prendre soin de l’homme malade en son âme et cela signifie que l’on réunisse ensemble tous les forces salutaires et thérapeutiques pour les mettre au service de l’homo patiens, et, ajoutons-le, au service d’une culture européenne nouvelle, orientée vers la recherche de sens.

 

Parmi les forces fondatrices qui ont permis l’avènement de l’Union européenne, on compte quelques personnes à l’horizon culturel vaste et possédant une douzaine d’idées fondamentales toutes centrées sur la dignité intangible de chaque être humain. Les personnes dont il est question ont conçu un lien si fort entre la volonté de sens et la volonté d’aimer qu’elles ont pu générer et établir des impulsions durables. A partir de ce moment-là (après la seconde guerre mondiale), de plus en plus de gens ont pris conscience que le rassemblement des forces dans un consensus fondamental doit avoir la priorité sur la dispersion destructrice. Le rassemblement des forces signifie que la volonté de puissance se subordonne à la volonté de sens et à la volonté d’amour. L’économie et l’écologie sont mises en relation. Une priorité importante est accordée à l’éducation orientée vers le sens et les valeurs. Le développement technologique s’inspire de la vie spirituelle. La concrétisation de tout cela est certes l’affaire de la politique, des institutions, des universités, des écoles, etc, mais aussi des autorités de Bruxelles, qui, à mon avis devrait enfin présenter un projet solide pour la discipline "Histoire de l’Europe" au moyen duquel dans tous les pays européens, au moins dans les lycées, un enseignement commun sera dispensé, qui mette l’accent sur les valeurs ayant donné naissance à l’"esprit européen", ou, selon le cas, ayant favorisé sa découverte et marqué de leur sceau. Le Bien, le Beau, le Vrai et le Sacré : c’est à ce quatuor de valeurs fondamentales qu’une nouvelle offensive culturelle doit accorder une attention particulière.

 

Ce sont là les forces structurantes qui contribuent à la conservation de la civilisation marquée par les cultures juive-hellénique-romaine-chrétienne-arabe, et qui lui permettront certainement de se développer dans le futur. Y est étroitement liée une vision de l’homme et du monde dont les éléments positifs, énoncés brièvement, sont les suivants : l’homme n’est pas Dieu, mais il porte en lui l’étincelle spirituelle du divin. (Frankl dit : "L’homme est une personne spirituelle, qui ne peut tomber malade. Elle est au fondement-même de sa dignité inconditionnelle, et l’homme est ouvert à la transcendance". Le monde (et notre terre en premier) n’est ni le lieu de l’exploitation de nos semblables ou de celle des ressources matérielles, ni celui du pouvoir arbitraire. Il est au contraire l’espace de vie et le lieu où se structurent harmonieusement les domaines matériel, social et spirituel. Le vivre-ensemble de tous les hommes sur la terre suppose quelques principes éthiques universels, qui ne sont pas créés mais qui doivent être découverts. (Ils ont d’ailleurs été découverts depuis longtemps, comme l’a été l’Amérique). La communauté d’États qui se sont rassemblés sous la bannière de l’ONU veille au respect des principes éthiques.

 

Pour en revenir à l’Union européenne, bien des choses ont été réalisées par rapport à ces principes. Ullrich Fichtner a montré dans une de ses contributions que l’UE est devenue une "puissance douce", qui malgré toutes les crises s’est muée en chef d’orchestre. Ses concepts du droit et des règles deviennent des normes à l’international. (in "der Spiegel", N°4/23.01.2021, p.17-21) Le ton fondamental de l’article indique que nous avons, nous Européens, suffisamment de raisons d’apprendre à apprécier à leur juste valeur et d’ aimer ce qui a été obtenu jusqu’à présent, parce que : "Avec sa grande expertise, l’UE fournit dans de nombreux domaines un difficile travail législatif et son autorité est reconnue dans de nombreuses questions" (Anu Bradford). Par exemple, dans le domaine de la protection des données, de la durabilité dans le domaine social et écologique et dans celui des Droits de l’Homme. "L’éternelle crainte de la pieuvre bruxelloise qui siphonnerait toute la démocratie présente dans les pays membres ne s’est pas vérifiée, pas davantage que l’éclatement de l’union, annoncé à intervalles réguliers pour des motifs variés". Et certains disent que "notre monde européen serait plus sain, plus aisé, plus avancé et bien meilleur que ne le pense la majorité." (Hans Rosling, médecin suédois, Européen dans l’âme, ayant travaillé dans des régions pauvres en Afrique et en Asie). La phrase suivante résume bien son message encourageant : "Celui qui se contente de tordre les mains n’en libère aucune pour retrousser les manches afin de mettre la main à la pâte". "Cette façon de penser et de ressentir "ferait aussi du bien, en pensant à l‘UE", car alors chaque citoyen européen pourrait se remettre à l’esprit que l’union des pays européens est, pour des millions d’êtres humains , une machine favorable à la paix, à la prospérité et à la longévité. On pourrait être fier de ce qui a été obtenu, et aussi de ce qu’au cours des décennies écoulées et grâce aux initiatives européennes, bien des choses ont été améliorées pour beaucoup d’êtres humains", écrit U. Fichtner dans son article du Spiegel.

 

La traduction pratique des objectifs que s’est fixés par elle-même l’UE, à savoir la préservation de la paix, la sauvegarde du climat, l’arrêt de la destruction de la nature, la protection des hommes et l’affirmation des droits humains, l’extension de la prospérité, l’amélioration de la vie, la recherche du bonheur et du sens, ces objectifs-là restent toujours l’aune à laquelle l’UE doit se mesurer elle-même. Le reste du monde a d’ores et déjà reconnu que "l’Europe a réussi à devenir un modèle pour le 21ème siècle, après avoir été un continent où les hommes se sont entre-tués pendant des siècles. Elle a sans doute atteint par là le maximum de sa puissance (douce)", dit U. Fichtner en terminant son intéressant article.

 

Alors que ces jours-ci nous nous souvenons qu’il y a 76 ans – le 8 mai 1945 – la deuxième guerre mondiale a pris fin grâce à l’intervention des Alliés- tout en sachant que les effets de la guerre sur les âmes sont toujours sensibles- cette commémoration nous invite avec urgence à poser des limites nettes à toutes les formes de fanatisme, d’extrémisme, de nationalisme et d’antisémitisme. Cela aussi fait partie de l’offensive culturelle. L’expression "apprendre à aimer l’Europe et ses valeurs" est peut-être mal choisie, car mon amour concerne les individus concrets, et non pas un continent, un peuple, un parti ou une institution- mais ce qui est signifié ici, à savoir que nous apprenions à apprécier à sa juste valeur l’esprit européen, contribue à faire comprendre à la conscience, qui en a l’intuition, qu’il s’agit de l’estime accordée aux valeurs européennes. Les valeurs sont détectées par la sensibilité et ressenties, alors que les concepts sont élaborés par la pensée. Donc, ensemble, la détection des valeurs par la sensibilité et l’élaboration, orientée vers le sens, de certains concepts, appariées avec la volonté de sens, la volonté de joie et la volonté d’aimer constituent les forces constructives dont nous avons besoin de toute urgence aujourd’hui.

 

Il est très important que, face au progrès rapide (dans le domaine technique et scientifique), la responsabilité dans l’utilisation des nouveautés qu’entraine le progrès soit également à la hauteur des enjeux. "Aussi longtemps que la conscience tient la technique en laisse, ce sera une bénédiction. Mais gare à la rupture de la laisse – alors, nous ne pourrons nous en remettre qu’à Dieu !" (E. Lukas)

 

Le mot "conscience" signifie ici la faculté spirituelle spécifique à l’être humain d’explorer et de reconnaitre ce qui fait sens, et non seulement ce qui est utile. En d’autres termes : la compréhension par la raison doit être subordonnée à la compréhension spirituelle. L’offensive culturelle européenne doit inévitablement avoir pour cible des éléments centraux de la formation du cœur et de l’esprit pour les traduire ensuite dans la réalité. L’informatisation galopante comme indicateur du progrès technique dans son sens large nécessite un contre-point, un équilibrage à travers l’éducation et la formation de l’âme et de l’esprit.

 

La logothérapie n’est pas la seule pertinente, le sont aussi des disciplines comme l’histoire de l’art, la musique, la philosophie, l’éthique sans oublier la formation spirituelle de la volonté telle que l’a présentée Ignace de Loyola dans ses Exercices, après l’avoir pratiquée.

Si nous voulons qu’une culture vraiment nouvelle, débarrassée de la haine et du fanatisme, voie le jour en Europe, elle dépendra inévitablement de la formation et l’entrainement à la volonté de sens, à la volonté de jouissance et à la volonté d’aimer.

 

Ces pensées ne sont pas encore présentes dans la politique européenne, ou alors très peu. Mais pour donner à ces pensées et à ces idées un degré d’efficacité accru dans le cadre d’une offensive culturelle européenne, nous pourrions revenir sur nos pas en faisant barrage à tout ce qui autour de nous tend à la destruction. Nos enfants et nos petits-enfants nous en seront reconnaissants.

12/07/21


 

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Article

 

Le Dr Hérold Toussaint, un homme de grande culture

 

Membre de l'ALF, le Dr Hérold TOUSSAINT fait la une du Quotidien d'Haïti n° 0079 du 8 mai 2021.

 

L'article complet se trouve à l'adresse :

https://lequotidiennews.org/le-dr-herold-toussaint-un-homme-de-grande-culture/

ou cliquez sur l'image

 

Son dernier ouvrage s'intitule "Poèmes-Prières pour la jeunesse haïtienne". Vous pouvez télécharger ci-dessous le début de l'ouvrage (Table des matières et Introduction).

28/05/2021

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Article

 

Repères logothérapeutiques pour la mutation de nos esprits et de notre monde, après le coronavirus COVID 19

 

par Valentin HUSSER

 

à télécharger ci-dessous :

23/04/2020

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Repères logothérapeutiques suite COVID
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Article

 La logothérapie dans une coquille de noix

V. Frankl

16/04/2020

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08

Article

 Pensées au travers de l’épreuve

 

Au cours d’une conversation avec mon jeune frère, médecin de profession et d’une nature plutôt réservée, je l’entendis prononcer ces paroles : « L’humanité est techniquement capable d’atteindre Mars, mais incapable de combattre un stupide virus, tout comme elle est incapable de vaincre la faim dans le monde. »

Il avait raison, ô combien, me suis-je dit plus tard. Seront-ils nombreux, ces humains sur terre, qui ressentiront et reconnaitront consciemment, en ces temps de crise causée par le coronavirus, la nécessité d’une « résurrection » éthique, spirituelle, noétique ? … Je n’en sais rien. Mais ce dont je suis certain, c’est que la recherche scientifique et technique, dirigée vers l’extérieur (comparable à l’expiration), doit être équilibrée par l’exploration soucieuse, dirigée vers l’intérieur, de la dimension psychique et spirituelle (comparable à l’inspiration). Cela nous évitera de retomber à un niveau animal en comparaison duquel les singes de la jungle feraient l’effet d’êtres supérieurs.

 

Non, il ne s’agit point ici de pessimisme, mais de la vision d’un « optimisme tragique » (V. Frankl) qui n’occulte pas la réalité des événements constituant cette grave crise aux multiples aspects.

Les forces de la nature ne se laissent maitriser qu’en partie, et en fin de compte, l’homme, avec ses recherches analytiques, se voit contraint de se soumettre aux lois de la nature, afin d’empêcher d’autres ravages.

 

A cet effet, il est indispensable que l’homo technicus et l’homo oeconomicus se reconnaissent, se sentent et se ressentent comme homo noeticus (un être humain spirituel) et perçoive qu’en lui - au plus profond de lui-même - sont présentes, à côté des forces rationnelles, des forces spirituelles et noétiques. Mais ces dernières ne peuvent être activées que par la volonté de sens et la volonté d’un sur-sens (Frankl), par une évolution intérieure, par la méditation, dans le silence, vers le "Je lumineux" originaire.

L’équation du monde ne se trouve pas à travers les recherches de la physique, de l’astronomie et de la neurobiologie, malgré l’importance que revêtent et revêtiront ces choses), mais elle a déjà été révélée par la maxime de Delphes : "Connais-toi toi-même". Ceci signifie : Connais-toi toi-même en tant que "Je lumineux" relié à des milliards d’autres "Je" et au tréfonds de toute vie, qui porte le nom d’ "amour originaire éternel auto-généré". Cette manière de se connaître suppose cependant que l’individu, et de nombreux individus, surmontent ou repoussent le plus loin possible en eux la jalousie, la haine et la dureté impitoyable pour mettre un terme au ravage de ces forces délétères. Avant cela, il n'y aura pas de résurrection en nous, êtres humains, avant cela, nous ne ferons pas l’expérience de la résurrection, qui signifie dans ce contexte "résurrection qui précède la mort définitive du corps".

 

Dans son œuvre philosophique intitulée "Le dieu inconscient", V. Frankl écrit : "La sensibilité de cœur peut être plus fine que ne l’est la raison dans sa perspicacité". Il veut dire par là que si nous choisissons d’activer en nous les puissances de la connaissance qui reposent au fond de nous, au-delà de la raison, nous confortons la prééminence du noétique sur le psychique et laissons advenir ainsi l’homo amans. Et c’est alors que se produit en nous, au tréfonds de notre être, la résurrection. Voilà ce que je nous souhaite, à nous tous, du fond du cœur.

 

Pr. Dr. Otto Zsok

Directeur de l'Institut de Logothérapie de Fürstenfeldbrück (Allemagne)

Traduction Bernadette Schmidt

11/04/2020


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Article

 

Logothérapie et Droits de l’Homme

 par Valentin HUSSER

 

"Être homme c’est toujours déjà se dépasser soi-même et cette transcendance de soi-même est l’essence de l’existence humaine." Viktor Frankl


        Bloqué dans la gare ferroviaire d’une grande ville de France, après une dédicace de mon livre(1), parce que j’ai raté mon train et que j’attends le suivant, je me réfugie dans une salle d’attente chauffée et aménagée pour que l’on puisse y travailler en branchant l’ordinateur. Et là, sur un mur de cette salle, je découvre, écrits blanc sur bleu, les Droits de l’Homme. Comme je suis très sensible à ce thème, je les parcours, et m’aperçois qu’en fait il est utile de me rafraîchir la mémoire. La plupart de ces droits me sont devenus tellement intériorisés et banalisés par la société, qu’il y a quelque chose de bizarre à les rappeler.
        Au retour chez moi, le long du chemin, je suis bloqué par la manifestation des Gilets jaunes. Bien que je ne roule pas sur l’or mais dans une voiture moyenne diesel, et que je me sente très concerné par le réchauffement climatique et l’évolution de la planète, je suis d’abord quelque peu agacé. Réclamer l’abrogation d’une taxe sur les carburants me paraît utile pour mon porte-monnaie individuel. Mais bloquer le pays en entraînant de gros désagréments pour les plus simples des conducteurs, me paraît excessif. La méthode et le ton employé me questionnent du côté du sens.
        Avec le recul, ces deux événements entrent en résonance. Que s’est-il donc passé dans la société française, ces derniers mois ? La frustration de consommation clamée avec véhémence sinon violence, sur les ronds-points, suffit-elle comme sens pour créer ce chaos ? Ces personnes, dans ces gilets jaunes, que j’ai rencontrées en d’autres circonstances, dans mon travail pour l’insertion professionnelle et sociale éprouvaient, à cette époque,  une honte à détailler leurs incapacités et étaler leur désespoir. Elles regardaient de loin, avec un œil admiratif en même temps que sceptique et envieux, les "nantis" bien habillés qui pouvaient, sans aucune gêne, comparer les mérites de telle ou telle table gastronomique où ils avaient coutume de festoyer.
        Et voilà que sur les ronds-points, sur les réseaux sociaux et à la télévision, leurs paroles libérées se faisaient revendicatives, hargneuses, insultantes même pour tous ceux qui représentaient les institutions en charge de la vie courante. Et cette véhémence leur procurait visiblement un sentiment de fierté. Fierté d’autant plus vive que des manœuvres diverses de ces institutions tendaient à calmer le jeu et restaurer ce qu’il est convenu d’appeler "l’ordre social".
        Que se cachait-t-il derrière cette frustration de consommation et cette exigence de reconnaissance ? Dans une perspective logothérapeutique, philosophie qui nourrit ma pensée et mon action depuis plusieurs années, j’y vois une frustration existentielle, la frustration du besoin de sens. Elle comporte plusieurs aspects que je souhaite vous présenter.
        Derrière la révolte, je vois un désir de sens. Dans le constat que les mesures annoncées tardivement par le Président de la République ne suffisent pas à calmer le jeu, je vois, bien sûr, la question du sens du travail et l’aspiration légitime à un monde plus juste et plus fraternel.  J’interprète le passage à l’acte comme le réveil d’une volonté de sens, de la part de ces personnes trop longtemps assimilées à des pourcentages de catégories qui font une sociologie et une politique… pourcentage de votants dans la population, pourcentage de bénéficiaires des minima sociaux, de chômeurs des différentes catégories, de populations sous le seuil de pauvreté, de non imposable, de pensionnés sous la barre des 1200 euros, etc… un égrenage de catégories socio-économiques manipulables, un tableau sans âme d’où l’humain a disparu. Et je pense que c’est de cela que souffre une grande partie des citoyens.
        Le vide existentiel généré par la société de consommation dont les bénéfices sont accaparés pour leur jouissance par une part restreinte des concitoyens, n’est pas comblé par l’annonce d’un pouvoir d’achat amélioré. La revendication profonde c’est se sentir exister en tant qu’individu, reconnu en tant que personne unique disposant, pour peu qu’il se libère, du pouvoir de défi de l’esprit, lequel peut, si les circonstances sont tant soit peu favorables, le tirer vers une élévation intérieure. Elle est habituellement dévoyée dans les chemins du pouvoir, de l’affirmation de soi en tant que possédant, de la fierté de soi en tant que dominant, d’une jouissance triviale qui laisse hébété. L’illusion maléfique dans notre société est de faire passer l’exigence matérialiste comme justification d’un désir d’accomplissement. Cet accomplissement est, en réalité, intérieur et noétique(2). C’est, en prenant un peu de hauteur, ce que ces crises peuvent nous révéler. C’est ce que les Droits de l’Homme, dans leur universalité, c’est-à-dire dans leur "tension vers" quelque chose qui concerne toute humanité, cherchaient à formuler. Ils sont apparus en 1789, et l’on ne peut nier quelle "Terreur" a suscité la Révolution Française et celles qui s’en sont inspirées de par le monde, au nom de ces principes de libération de l’homme.
        À la recherche de "la loi naturelle" qui exprime ce à quoi a droit d’aspirer tout être humain, les penseurs des Droits de l’Homme ont axé leur formulation sur les conditions de vie. Peut-être qu’à l’aube de la civilisation industrielle, ils n’ont pas pu lever les yeux suffisamment haut pour pouvoir écrire : "Article numéro un : Tout homme est invité par la vie à trouver le sens qu’elle lui propose à chaque instant". Et, s’ils ne s’étaient laissés limiter par les conditions de l’histoire à exiger des droits, ils auraient pu ajouter un devoir fondamental : "Ceux qui prennent la responsabilité de conduire les autres vers le sentiment d’accomplissement ont le devoir de rechercher ardemment dans leur propre existence et dans les réalisations sociales qui s’imposent, une plénitude de sens qui honore la vie". Que de sang et de larmes eussent été épargnés !
        Pour ne pas se laisser piéger par la primauté de la technique sur la conscience, qui pose la question de la transformation des désirs en droit, une telle formulation ouvrirait une possibilité d’aller vers la transcendance, comprise comme la projection intentionnelle de la conscience vers le dépassement de soi et des conditionnements. Conçue dans la perspective de la liberté indissolublement liée à la responsabilité, elle ouvrirait à une incarnation du sens, dans les actes concrets de l’homme, conscient de la part qu’il a à prendre dans l’accomplissement de sa vie et dans la responsabilité collective planétaire qui s’imposerait comme un devoir au niveau de l’humanité.
        Les conséquences dans le devenir de nos sociétés pourraient ouvrir de nouvelles possibilités pour chaque être humain.
       Dans le monde francophone, la logothérapie a concerné jusqu’ici(3) surtout la psychothérapie à laquelle elle donne une anthropologie humaniste et une pratique orientée vers le sens et les valeurs, qui va jusqu’à la relation transnoétique(4), acte thérapeutique par excellence. Elle inspire des praticiens du coaching, du travail social, de la formation et de l’insertion professionnelle, de la pédagogie des adultes, de l’accompagnement des personnes, notamment dans la fin de la vie, les problèmes de couple, la guidance parentale, ainsi que des éducateurs et des arts thérapeutes. Dans la psychiatrie, elle éclaire la "liberté à consentir" évaluée chez le patient. Elle pourrait contribuer au rétablissement post traumatique et à la médiation pair-aidance. Au Rwanda, elle aide à  la réhabilitation post génocide et à Haïti(5), elle soutient le courage de revivre.
      En résonance avec les Droits de l’Homme, la logothérapie permet d’éclairer les grands défis qui bouleversent l’actualité de notre société.
      Le phénomène des migrants incite à définir la démocratie comme une autolimitation des peuples au risque de l’émergence de totalitarismes. La logothérapie se positionne clairement contre le totalitarisme en même temps que contre le conformisme. Elle appelle donc à une appréciation à laquelle  chaque humain concerné est invité, pour sa part, à un effort de conscience.
Face aux traumatismes qui se vivent dans de nombreux pays, à l’instar de l’Europe à l’époque nazie et plus récemment du Rwanda, la logothérapie invite à trouver le sens dans la direction d’une humanité unie qui évolue pour honorer la vie.
      Le transhumanisme qui fascine tant la société occidentale, à partir d’un ultra individualisme est questionné par le sens. En vue de quel devenir s’élabore la GPA qui utilise le corps de l’autre pour produire de l’humain "à façon(6)" ? Dans quel but fabriquer une humanité "augmentée" par la technologie, l’ingénierie  génétique, dont le pouvoir peut être multiplié par l’intelligence artificielle ? Au-delà des thérapies innovantes, la conception que l’homme se fait de lui-même sera-t-elle conditionnée par l’eugénisme ? Saura-t-il garder le sens  du lien humain, et de la vie, dans sa finitude naturelle ?
      Viktor Frankl répond "À plus longue échéance, je flaire encore un autre danger : la corruption de l’homme par l’automation". "Cette croissance de l’automation (…) risque d’influencer, et donc de menacer, la façon dont l’homme se comprend lui-même. L’homme pourrait, en effet, être tenté de se mésestimer lui-même en se comparant aux machines à calculer et aux ordinateurs(7)". Nous savons aujourd’hui qu’il pourrait être tenté par la toute-puissance démiurgique, sans conscience.
        Le terrorisme, quel qu’il soit, est pleinement réprouvé dans cette vision du sens de la vie, qui va jusqu’à proclamer comme valeur la plus haute, le pouvoir de mourir dans la dignité, quand tout ce qui est possible a été fait pour préserver la vie.
      L’exploitation commerciale,  financière et politique "de corps et d’âmes d’hommes" est clairement réprouvée par Viktor Frankl : "Car la dignité de l’homme lui interdit d’être lui-même un moyen, de devenir un simple instrument du processus de travail, d’être dégradé jusqu’à devenir un moyen de production". A plus forte raison une marionnette du pouvoir, ou un objet à jouir ou de la chair à canon !
        L’homme, qui a "toujours déjà un monde", son monde à lui (Mittwelt) inclut dans l’univers (Umwelt) est invité à une vision cosmique du devenir de la terre où l’action individuelle de chaque être humain participe à une responsabilité planétaire non seulement politique mais écologique "Il n’y a pas de culpabilité collective (…), mais il existe une responsabilité planétaire qui englobe toute l’humanité" Viktor Frankl, 23 octobre 1946.
Suffit-il, pour qu’une existence humaine ait une signification valable, de la consacrer au développement personnel ? La réponse de Viktor Frankl est claire : "Si tant est que l’accomplissement et la réalisation de soi-même ont leur place dans une vie humaine, ils ne peuvent être atteints que per effectum, non per intentionem. C’est seulement dans la mesure où nous nous livrons, nous donnons, nous mettons à la merci du monde, des tâches et des exigences qui à partir de lui nous interpellent dans notre vie, dans la mesure où ce qui compte pour nous c’est le monde extérieur et ses objets, et non pas nous-mêmes ou nos propres besoins, dans la mesure où nous accomplissons des tâches et répondons à des exigences, dans la mesure où nous réalisons une signification et des valeurs, c’est dans cette mesure seulement que nous nous accomplirons et réaliserons également nous-mêmes, comme par surcroît(8)". La vocation d’un logothérapeute, et avec lui de tout être qui prend conscience qu’il est humain, est indiquée. À chacun de choisir de répondre à cet appel de la vie, en responsabilité.
        Ces quelques considérations, inspirées de la logothérapie confrontée aux Droits de l’Homme, montrent qu’elle a affaire à l’homme souffrant non seulement dans son psychisme, mais aussi dans ses problématiques existentielles intimes et sociales, dans le devenir de l’humanité et du cosmos. En conséquence des Droits de l’Homme, elle renforce l’individu dans sa responsabilité existentielle et lui indique des devoirs contre ce qui fait violence à l’être humain. C’est une dimension essentielle du sens en vue du bonheur d’être.

 

Valentin HUSSER, logothérapeute, membre du CA de l’ALF

18 décembre 2018

 

Notes

1     Valentin Husser, Savoir Devenir, Libérez-vous du piège de l’échec, Editions Sydney Laurent, 2018
2     Noétique, terme choisi par Viktor Frankl pour désigner le spirituel non confessionnel
3     La logothérapie dans un monde en mutation, collectif d’auteurs sous la direction de Christian Merle, éditions ALF
4     Rolf Kühn, in Logothérapie et phénoménologie, Editions l’Harmattan, 2015 et son article sur l’Acte thérapeutique sur le site de l’ALF.
5     Herold Toussaint, Le courage d’habiter Haïti au XXIe siècle, Publié le 17/07/2018, Ed. Le Nouvelliste
6     Benoît Bayle, A la poursuite de l’enfant parfait, Ed. Robert Lafont 2010
7     Viktor Frankl, La psychothérapie et son image de l’homme, Ed. Centurion Resma, 1970
8     Viktor Frankl, La psychothérapie et son image de l’homme, Ed. Centurion Resma, 1970


06

Article

 Une intense année de logothérapie

 par Valentin HUSSER

 

       J’entre dans ma dixième année de logothérapie – formation, certification, mémoires "Déjouer la peur de réussir" et "Apport de la logothérapie dans mon expérience de supervision en médicosocial", plusieurs articles dont certains publiés sur ce site, 3 missions au Rwanda en équipe et en collaboration avec les logothérapeutes rwandais. Quelle mission m’a confié la Vie dans cette première partie de 2018 ?

 

ACP Atelier de croissance personnelle Strasbourg

       Les 23 février et 17 – 18 mars 2018 ont eu lieu la conférence et le séminaire de 2 jours, "Trouver le sens dans votre existence", présentés sur ce site. Organisé par l’ACP Atelier de Croissance Personnelle - un millier de contacts sur Strasbourg et un programme dense et bien suivi, ce cycle a réuni une cinquantaine de personne à la conférence et 13 aux 2 jours d’atelier.

       Une "très belle conférence" appelant vers  ce qui est profondément humain en nous, selon les organisateurs et un atelier où les participants ont pu aller loin dans leur prise de conscience existentielle et le traitement de leur problème. Ainsi que plusieurs le mentionnent dans leur évaluation, ils ont bien intégré que la logothérapie n’est pas un "outil" que l’on peut s’approprier en 2 jours et quelques lectures, mais un regard sur soi, l’homme et le monde,  au travers duquel la Vie pose une question personnelle à chacun en tant qu’être unique, dans la situation concrète. Il s’agit de se laisser travailler par cette question, sous l’angle des valeurs et du sens et d’y apporter une réponse en responsabilité.

       Cette conférence faisait suite à l’intervention demandée par la Commission de rencontre avec les spiritualités d’aujourd’hui, au colloque strasbourgeois du  21 avril 2017 sur l’intériorité. Ce thème a été traité par un psychologue clinicien, une sœur de charité, un animateur Mindfullness et moi-même en tant que logothérapeute. 75 personnes y ont participé, dont 35 ont suivi l’atelier de logothérapie. Plusieurs participants du colloque d’avril 2017 sont venus à la conférence de 2018. Egalement des demandeurs d’emploi séniors et nouveaux salariés issus des groupes de Strasbourg ainsi que des responsables institutionnels, mes partenaires professionnels. Ils ont beaucoup apprécié. Le message est reçu !

       Des suites sont demandées, qui montreront ce que l’expérience des thérapeutes du Rwanda dans la réconciliation post-génocide apporte sur le chemin du pardon.

 

Communauté des chrétiens Colmar

       La Communauté des chrétiens de Colmar m’a invité dans son nouveau local Rue Saint Gilles à donner une conférence vendredi 20 avril soir, suivie d’un atelier samedi 21 avril 2018 matin.

       Dans le cadre d’une série de conférences dont le thème central était « revivifier le quotidien », la logothérapie a été choisie parce que, orientée vers le Logos, elle réhabilite la dimension noétique dans son anthropologie et sa pratique.

       Après avoir posé les principaux repères de la vie et des idées de Viktor Frankl, et demandé au pianiste de nous jouer un air de tango pour sentir qui était Viktor Frankl, j’ai insisté sur le changement de regard qu’apporte la dimension noétique, dans la théorie et aussi dans la pratique de l’accompagnement logothérapeutique des personnes en souffrance. Avec un auditoire passionné et exigeant, j’ai pu aller jusqu’à la "métaphysique du quotidien" dont se fait l’écho Elisabeth Lukas dans "Logothérapie, Théorie et pratique".

       Je me suis appuyé aussi sur des passages de "L’homme souffrant" où Viktor Frankl situe la mission du thérapeute par rapport au médecin et au prêtre. Cet apport s’intégrait bien dans la progression de ces conférences, dont la première, le vendredi précédent, traitai du médecin, et la troisième, le vendredi suivant, du prêtre selon l’anthropologie anthroposophique. Nous avons, Claudia Storckmann et moi-même, pris bien soin de préciser la différence et les contiguïtés entre la pensée de Rudolf Steiner et celle de Viktor Frankl, autour de la guérison. Ce thème sera mis en travail en relation avec la  Société anthroposophique et proposé dans le groupe de Muntzenheim.

       40 personnes, dont une dizaine de participants inhabituels, ont assisté à la conférence. Parmi eux, j’ai eu la bonne surprise de compter plusieurs demandeurs d’emploi et formatrice issus des actions d’accompagnement professionnels des séniors. La graine semée germe !

       15 personnes ont consacré le samedi matin à l’atelier où nous avons approfondi différentes notions issues des questions des participants. Je me suis appuyé aussi sur l’étoile du sens que je présente dans mon livre "Savoir devenir – Libérez-vous du piège de l’échec - Guide pour réussir sa vie personnelle et professionnelle" maintenant disponible aux Editions Sydney Laurent.

       Ce fut un beau moment pour moi et aussi pour les participants. Plusieurs d’entre eux m’ont demandé un accompagnement. J’avais parlé du travail de réconciliation au Rwanda, à propos de la dimension noétique qui permet de transcender les blessures et fixations égotiques. Une suite sur ce thème est également en gestation.

 

Conclusion

       Au-delà des accompagnements individuels qui se multiplient, je ne peux que constater le succès de ces conférences et ateliers, auxquels il faut ajouter le congrès national de la Fondation OCH Office Chrétien des Handicapés à Dinard début 2017. Le thème était "Etre acteur de sa vie", "Comment la logothérapie peut aider à devenir acteur de sa vie". Ce fut un moment fort également, assumé avec Martine Salleron, qui prouve que le message de la logothérapie est vivant et réponds aux problématiques de notre temps. Il en est de même dans l’activité de mes collègues logothérapeutes.

       Je reçois ce résultat aussi comme une question que la vie me pose dans cette période de décroissance de mon activité professionnelle traditionnelle : Que faire de l’expérience et de la "sagesse" accumulées durant ces années superactives ? Qui en a besoin ? A quoi vas-tu choisir de consacrer la période de vie qui s’ouvre ? Ecoutons la vie !!! A suivre….

 

Valentin Husser
Membre du CA de l’A.L.F.
17 juin 2018


05

Article

Ajout Mai 2018
Au Rwanda depuis le 6 avril se déroulent les commémorations du génocide contre les Tutsi de 1994...

 

Le sens d’une commémoration

 

En soutien au peuple rwandais et à nos amis rwandais, logothérapeutes et membres de l’A.L.F., durant les commémorations du génocide contre les tutsi, qui a lieu au Rwanda depuis le 6 avril et se déroule dans les différents lieux aux dates des évènements de 1994, jusqu’à la fête de la libération le 4 juillet.
Selon nos correspondants, thérapeutes rwandais qui accompagnent leurs compatriotes dans ce vécu particulier, le sens de la commémoration cette année, c’est la réhabilitation.

 

« Nous devons nous rendre compte de ce qui a été vécu. Cela fait partie de notre fragilité. Il est important de voir notre fragilité, pour entrer dans la vie autrement.
Sentir la douleur de tout ce qu’il y a à vivre, toute la vie.
Ce n’est pas seulement douloureux, c’est une révélation. La commémoration est un moment méditatif. Un moment de foi. Cela nous amène à prendre des résolutions, appeler un avenir sans cette violence, prendre position devant la vie.
La commémoration amène à guérir du désir de vengeance. Porter ensemble le passé permet de choisir ensemble l’avenir. »


La pensée de Viktor Frankl nous ouvre un prolongement en direction du sens d’une commémoration.


L’homme est en devenir.


« L’homme est le fils de son passé, et il est le père de son futur » écrit Viktor Frankl.


En effet, à tout instant, par le pouvoir de défi de l’esprit, l’humain a la possibilité de décider « de ce qu’il sera l’instant suivant » nous dit Frankl.


Quand JE décide de mon positionnement par rapport à ce qui me sollicite, qui vient du monde qui m’environne, j’actualise une des possibilités présentes dans l’existence. Et je suis responsable de le faire. Si je m’abstiens de prendre position, je prends de fait position passivement devant ce qui advient.


Car, l’avenir, à-venir, est déjà là dans les possibles de la situation présente.


Dans l’homme souffrant page 137 Viktor Frankl écrit :
« Ce qui est nécessaire, c‘est le respect du passé. Ce n’est pas l’avenir : non, c’est le passé qui est inexorable. Car l’avenir, notre avenir, se trouve pour une bonne part, avant notre décision, et nous en sommes responsable. Nous sommes responsable, devant le passé (impossible à fuir) pour l’avenir- qui doit être décidé ».


Le respect du passé entraine peur et défi.


« La peur concerne ce qui est abrité dans le futur ; mais le défi sait ce qui est abrité dans le passé ».
La peur, réaction émotionnelle, doit être transcendée par l’attitude de défi, qui est un geste noétique. L’homme est responsable de ce qu’il provoque et de ce à quoi il renonce. Toutes les possibilités sont présentes dans l’instant : celles qui vont être actualisées et celles qui ne le seront pas.


C’est une illustration de l’optimisme tragique : sachant toutes les horreurs, limites, fautes… dans le passé, malgré tout, chercher les meilleures possibilités dans l’avenir et les actualiser. C’est dans ce sens qu’il n’y a pas de déterminisme : ce qui a eu lieu a laissé non accompli ce qui a été rejeté ou délaissé inconsciemment, cela reste donc disponible pour l’avenir ; disponible non de façon obligatoire, mais de façon facultative, soumis à notre choix personnel.


Puisse la prise de conscience de cette dimension de notre existence nous donner le courage d’avancer.


Valentin Husser
Membre du CA de l’A.L.F.
30 avril 2018


04

Article

 Ajout Sep 2017

L'acte thérapeutique

 

par Rolf Kühn, professeur de philosophie aux universités de Vienne, Beyrouth, Nice, Lisbonne et Louvain-la-Neuve, directeur du "Centre de recherche actuelle sur la philosophie française de religion" à Fribourg-en-Brisgau et du "Forschungskreis Lebensphänomenologie" , formateur et superviseur en analyse existentielle.

 

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03

Trouver le sens, donner du sens... Quelle est la spécificité de la logothérapie ?

  

Par Valentin HUSSER, Consultant, psychologue et logothérapeute accrédité RdL©

Novembre 2015

 

 

Au-delà du débat d'experts, il y a derrière ce thème un enjeu fort dans l'accompagnement logothérapeutique.

La quête de sens est un besoin de plus en plus pressant dans notre société occidentale, et, au-delà, dans toute société humaine où des violences ont déstabilisé les valeurs et brouillé les repères...

 

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02

La méthode de l'intention paradoxale
développée par Viktor Frankl

 

Par Benoît BAYLE, Psychiatre hospitalier et docteur en philosophie.

 

Parmi les méthodes développées par Viktor Frankl, la méthode de l’intention paradoxale va permettre de soigner efficacement les phobies et les obsessions-compulsions. Elle a fait l’objet de nombreuses publications scientifiques internationales, elle a été utilisée par des thérapeutes cognitivo-comportementaux, et a également été reprise par l’école de thérapie systémique de Palo Alto sous le terme d’injonction paradoxale.

 

Article se trouvant sur le site www.lareponsedupsy.info


01

Redonner sens à la vie

 

Par Christian MERLE, Psychopraticien de la motivation et logothérapeute accrédité RDL©, professeur émérite de l'Université de Nantes

Mars 2012

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redonner sens à la vie C.Merle 03 2012.
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